Les modernes répètent volontiers depuis Pascal que l’opi- nion est la reine du monde. Nous allons voir qu’ils en font commencer le règne un peu tôt, en la rendant responsable de tout ce qui s’est fait en bien et en mal depuis le temps qu’il y a des hommes, et qui pensent. Croyant voir, en tout cas, qu’elle commande aujourd’hui à la politique, et s’imaginant mal qu’il n’en ait pas toujours été ainsi, ils lui attribuent couramment la continuité et l’ubiquité de manifestation des choses éternelles ; la seule différence entre le passé et le présent étant qu’en consacrant l’Opinion comme souveraine de l’univers, on reconnaîtrait enfin de façon expresse l’existence d’un phénomène dont on se bornait jadis à vivre l’emprise et à subir passivement la loi.